dimanche 18 janvier 2009

Un hôte bien caché!



Vous me vexeriez si vous n'agrandissiez pas certaines images.















Chers vieux chambranles des fenêtres du Prieuré d’Hérival,
Chers ventaux du XVIIIe siècle qui se disloquent,
Chers petits carreaux de verre bullés.
Vous avez tous bien vécu !
Vous êtes en chêne pourri par le bas, vous ne maintenez plus vos carreaux, il faut vous descendre, la relève est en bois exotique laqué, c’est du double vitrage, il faut l’accepter.



J'ôte les deux ventaux avec précaution, vous êtes en piteux état.
Je vous démonte, boiseries de l’encadrement de la fenêtre, avec précaution avant d’extraire les chambranles exténués.
J’extrais délicatement vos quatre panneaux de sapin vermoulu.
Je libère ainsi la place pour le spécialiste des fenêtres neuves d’usine.
Je place précautionneusement les vieux panneaux les uns sur les autres dans la pièce encombrée.
En me redressant et en me retournant afin de, finalement, démonter les chambranles, je lève la tête et…
je vois un petit bonhomme qui tend ses petits bras vers la cour du prieuré ; sans me voir.
Il vient de voir le jour.



Il était bien caché derrière le panneau gauche de cette fenêtre à l’abri de la lumière du soleil levant.
Cette fenêtre est placée juste au-dessus du porche.
Le bonhomme est petit, il a un pied en avant, sa redingote est dessinée par transparence sur son corps.
On distingue bien la découpe du rabat de la poche des costumes de cette époque ; le col est aussi un élément du costume qui nous transporte au XVIIIe.








Bonjour Monsieur !
Vous êtes qui ?
Que faisiez-vous derrière l’un de ces quatre panneaux de bois ?
Vous y êtes depuis presque deux siècles, plaqué comme une image dans un carton à dessin fermé.
Vous êtes réalisé à la sanguine.
Par qui ?
Vous avez la chevelure nouée sur l’arrière.
Votre dessinateur semble à l’aise avec son bâton de sanguine et pourtant il est assez maladroit ; il vous a fait l’œil un peu proche du front.
Aisance à la caricature ou maladresse d’une personne qui dessine à l’occasion ?








Bons jours à l’air libre !

C’est vous aussi, Monsieur le dessinateur qui avez laissé une tête sur le porche de la porte de grange de chez Violette notre défunte voisine. Je reconnais bien votre coup de crayon, heu, de sanguine. C’est la même tête, l’œil est aussi haut placé.







Que faisiez-vous ici en 1750 ou en 1790 ?

C’est vous l’homme en redingote ou bien vous croquiez un homme planté dans cette position au milieu de la cour du Prieuré d’Hérival ?
Vous étiez là lors de la construction, j’en suis certain.
Vous saviez très bien que votre personnage dessiné sur le grès allait se faire recouvrir par ce panneau de bois.
Vous ne l’auriez pas dessiné là si vous n’aviez pas été certain qu’il allait se faire recouvrir des planches de la boiserie.
Vous l’avez voulu ainsi, ou était-ce seulement un jeu sans importance ?
Les belles pierres de grès blanc semblent avoir été votre carnet de croquis lors de vos pauses.
C’est vous aussi qui avez laissé ces bâtons de compte à la sanguine sur ces pierres ? Vous comptiez les poutres, les sacs, les lames de bois ?

Nous, nous vous laisserons voir le jour et la nuit tous les jours et toutes les nuits.

Bientôt, vous ferez partie de la famille, on vous tutoiera.

« T’es qui ? »